Fin de mission, Phil Klay,
Gallmeister, 23€80
coup de cœur Romain |
Recueil de nouvelles traitant des
vétérans américains à leur retour d'Irak. Histoires de terrains
ou de leur difficile retour à la vie civile. Témoignages parfois
crus qui ne laissent pas de place au superflu mais au superlatif de
l'horreur... Oubliez la guerre en Irak que vous avez cru
entrapercevoir par le prisme des médias. Pas de place pour les avis
partisans, ici vous découvrirez le traumatisme des marines et leur
incapacité à retrouver un sommeil, des relations, bref une vie
normale !
Un témoignage très fort qui s'ajoute
à la très belle collection « americana » dans la lignée
de Compagnie K.
« Mais quand je me suis
présenté au guichet et que j'ai rendu mon fusil, ça m'a coupé
dans mon élan. C'était la première fois que je me séparais de mon
arme depuis des mois. Je ne savais plus où mettre les mains.
D'abord, je les ai mises dans mes poches, puis je les ai ressorties
et j'ai croisé les bras, et finalement, je les ai laissées
retomber, inutiles, le long du corps. » page 14
« Voilà, c'est comme ça que
s'est passé mon retour à la maison. C'était chouette, je dirais.
Rentrer c'est comme respirer pour la première fois après failli se
noyer. Même si ça fait mal, c'est bon. » page 18.
« On a pris ma prime de combat
et on a acheté des tas de choses. C'est comme ça que l'Amérique
riposte aux terroristes. » page 20
« Il y a des types qui
grimpent directement au rouge. Ils y restent pendant un moment, et
puis ils s'écrasent, ils retombent en dessous du vert, plus bas que
le niveau « J'en ai rien à foutre de mourir. » La
plupart des autres restent à l'orange en permanence.
Vous voulez savoir ce qu'est
l'orange ? Vous ne voyez plus et vous n'entendez plus comme
avant. La chimie de votre cerveau change. Vous saisissez tous les
détails de votre environnement, absolument tous. Je pouvais repérer
une pièce cents à vingt mètres de distance dans la rue. »
pages 21 – 22
« La porte de derrière mène
à la cuisine. A droite, OK. A gauche, OK. En haut, OK. A l'arrière,
OK. Cuisine, OK. On avance, on ne se regroupe pas, on continue à
avancer. Lentement, question de fluidité. La fluidité, c'est la
rapidité. Le groupe du caporal-chef Sweet vous nettoie une maison
comme l'eau qui coule dans un ruisseau. »
« Le 1er Bataillon du 9e
marines. The walking Dead.
Les devises des bataillons étant ce
qu'elles sont, ils ont probablement la meilleure. Grâce au Vietnam,
le 1/9 se targue de détenir le record du plus haut taux de morts au
combat dans toute l'histoire du corps des marines. Les marines, qui
aiment se voir comme des chiens enragés d'une agressivité
suicidaire, et qui parfois se comportent de manière à être à la
hauteur d'une telle image de soi, considèrent qu'un tel record,
c'est « super ».
« Vous courrez suffisamment
vite et au bout d'un moment, c'est bon, toutes les émotions
contenues s'expriment dans le mouvement de vos bras, la brûlure dans
votre poitrine, le poids lent et pesant de la fatigue dans vos
jambes, et vous pouvez vous laisser aller à penser tout simplement.
Vous pouvez penser en éprouvant de la rage, du chagrin, n'importe
quoi, et cela ne vous déchire pas, parce que vous êtes en train de
faire quelque chose, quelque chose qui est assez dure pour que vous
le ressentiez comme une réponse appropriée à l'agitation dans
votre esprit. Les émotions ont besoin d'un exutoire physique. Et si
vous avez un peu de chance, le physique prend le pas sur tout le
reste. Cela m'arrivait autrefois, quand je pratiquais le combat
libre. Vous vous épuisez jusqu'à ce qu'il n'y ait plus que la
douleur et l'euphorie. Quand vous atteignez cet état, le reste ne
vous manque plus, tous les petits sentiments que vous éprouvez. »
page 278
« Le bruit nous avait frappés
de plein fouet, se répercutant dans tout notre corps, à l'intérieur
de notre poitrine, dans nos entrailles et nos dents du fond. Je
sentais le goût de la poudre dans l'air. Quand les canons tiraient,
les tubes coulissaient en arrière comme des pistons, avant de
reprendre leur position, la force de chaque obus qui partait
soulevant un nuage de fumée et de poussière. Quand j'ai regardé la
rangée des pièces, je n'avais pas vu six canons. J'avais simplement
vu du feu à travers le brouillard, ou même pas du feu, mais de
simples éclairs rouges dans la poussière et la cordite. Je sentais
le rugissement de chacun des canons, pas seulement celui du nôtre, à
chaque tir. Et je me disais, Mon Dieu, voilà pourquoi je suis
content d'être artilleur. »
J'adore ce recueil :)
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