Le lièvre d'Amérique, Mireille Gagné, la peuplade, 18€ "Diane a toujours préféré ce moment de la journée: l'aube. Cette impression d'être éveillée plus tôt que tout le monde. D'avoir plus de temps. Plus de contrôle. Un avantage discret qu'on porte en soi, comme un sous-vêtement écarlate sous chemisier opaque." p28 "Il y a de ces jours sur l'ïle où le vent semble furieux. Il hurle sa rage pendant des heures. Fouette les corps. Remue les eaux profondes. Même les bateaux doivent prendre les vagues de côté. p41"
Le Berger de l'Avent, Gunnar Gunnarsson, Zulma, 6€95
"Il ressentit tout à coup une sorte de vide intérieur, une nostalgie bizarre qu'il aurait été bien en peine de définir ou d'expliquer. Etait-ce parce qu'il abandonnait, pour quelques jours, les terres habitées ou parce que, chaque fois qu'il les quittait ainsi, il pensait au jour où il devrait s'en séparer à jamais? L'homme s'accroche à ce qu'il est, à ce qu'il possède, jusqu'à la tombe. Il redoute de perdre la vie -réalité des réalités, fragilité des fragilités. Il craint la solitude qui est la condition même de son existence. Il a peur d'être oublié des autres et peut-être de Dieu." " Mais dans la montagne, le sentiment d'isolement prend un tour différent. Tant qu'on entend d'autres voix que la sienne, tant qu'on se sent, près de soi, une respiration, le vide profond de l'univers, au ciel et sur la terre, ne vous étreint pas tout à fait de ce froid glacial, à la racine des cheveux."
« Dans la lumière grisâtre de
l'aube de ce samedi, la brise se changea soudain en vent glacial: la tempête, la tempête éternelle était revenue. Elle s'acharnait sur l'homme, l'obligeait à escalader de véritables murs, des montagnes de neige accumulées par le vent qui lui déchirait le visage. Contre toute attente, de façon presque incompréhensible, il parvint à maintenir le cap tant la connaissance du terrain et de ses moindres détails était gravée en lui
La panthère des neiges, Sylvain Tesson, Gallimard 18€ 167 pages
« Hier, l'homme apparut,
champignon à foyer multiple. Son cortex lui donna une disposition
inédite : porter au plus haut degré la capacité de détruire
ce qui n'était pas lui-même tout en se lamentant d'en être
capable. A la douleur, s'ajoutait la lucidité. L'horreur parfaite. »
p55
« Les animaux incarnent la
volupté, la liberté, l'autonomie : ce à quoi nous avons
renoncé » p64
« L'homme s'était dispersé,
avait fertilisé les limons, domestiqué les troupeaux, inventé un
Dieu unique et commencé la coupe réglée de la Terre pour parvenir,
dix mille ans plus tard, à l'accomplissement de la civilisation :
l'embouteillage et l'obésité. » p135
Le testament des gouttes de pluies, Einar Mar Gudmundsson, Gaïa, collection Kayak (poche) 11€
Ils se retrouvent immobilisés car ici, il n'y a aucun moyen d'échapper à la tempête, il est inutile de rebrousser chemin, la seule possibilité étant de poursuivre sa route en dépit de l'immobilité. Ainsi, quelle que soit la façon dont ils se tiennent, les gouttes viennent les frapper. Voilà pour quoi les visages de ces hommes téméraires sont à la fois rougis par la pluie, glacés et grimaçants.
Un court instant de grâce, André Bucher, éditions Le Mot et le Reste, 19€
La montagne empiétait sur l'horizon,
sa masse inerte accaparait le paysage. Une entité dure mais
également fragile, avec la forêt comme territoire, que l'on ne
saurait dompter et modeler à sa guise. On s'interrogeait sur son
devenir. Que penser de ce pays ? Un endroit improbable ayant lié
pacte avec le temps, des monts scellés à l'infini de la terre
jusqu'au ciel ? Les arbres, les rochers, le peu de terrains
cultivables, les prairies, la rivière : tous à la fois offerts
et réfractaires à la venue, la survie des quelques êtres ou
familles, tour à tour inscrivant leur passage, leur histoire, et
dont le nombre comme la durée de l'existence, s'amenuiserait à
chaque nouvelle génération.
188 mètres sous Berlin, Magdalena Parys, Editions Agulho, 22€ Twelves bar blues, Patrick Neate, éditions Intervalles, 24€ Le retour du gang, Edward Abbey, éditions Gallmeister, 12€ Anthracite, Cédric Gras, Stock, 20€
« j'ai déverrouillé
successivement les deux portes de l'appartement, traversé les
parties communes décrépites et attendu l'ascenseur biélorusse
Mogilev, celui qui équipe toutes les barres de béton
kroutchtéviennes, de Donetsk au Kamtchatka et de Lviv à Almaty ;
le genre de mécanique qui a plus solidement soudé les citoyens
soviétiques à travers toutes les ex-républiques que les idées
léninistes elles-mêmes. L'expérience quotidienne d'un même
environnement manufacturé forge les identités plus sûrement que
les théories politiques. C'est aussi cela la nostalgie de l'URSS, la
mémoire attendrie de l'industrie nationale. On se souvenait dans un
soupir nostalgique des appareils ménagers soviétiques, des
réfrigérateurs Minsk ou Dniepr, des magnétophones Komiéta, des
distributeurs d'eau gazeuse dans les rues et même des confiseries
chocolatées coulées dans le kombinat de Léningrad : tout
l'univers du made in USSR. A Donetsk, c'était l'anthracite. »
Kamtchatka, Julie Boch & Emeric
Fisset, Transboréal, 20€90
« Les ours goûtent,semble-t-il,
la profusion offerte par cette langue de terre entre mer et lac :
en moins de dix minutes, nous en apercevons six. C'est plus que dans
tous les Pyrénées. Nous songeons souvent au sort que notre pays
réserve à ces animaux mal aimés, chassés des lieux qu'ils
habitent depuis six cent mille ans, poussés hors d'une nature que
son asservissement à nos désirs et à nos craintes peu à peu
aseptisée. La haine qu'il suscite est si disproportionnée par
rapport à leurs nuisances, et surtout aux nuisances que l'homme
s'inflige à lui-même ! Combien de morts accepte-t-on sur les
routes pour prix de la vitesse de déplacement ? Combien de
policiers, combien de juges nos impôts financent-ils pour nous
défendre de notre propre violence ? Combien d'enfants mordus
par les milliers de chiens d'attaques qui prolifèrent en France ?
Combien de vaches abattues, sacrifiées sur l'autel de
l'engraissement industriel qui leur fait naître des maladies ?
Mais que cinq ours dévorent un troupeau de moutons et on crie haro
sur la bête féroce.
Vous n'êtes pas bergers, dira-t-on.
Mais nous ne sommes pas automobilistes non plus, pourtant nous
subissons toute l'année les marées de camions, les gaz
d'échappement, le bruit et la laideur des installations dévolues à
la voiture. Et comment font les éleveurs italiens, qui vivent en
bonne intelligence avec le loup ? L'homme n'a eu de cesse,
dira-t-on encore, de se débarrasser au fil des siècles de ces bêtes
sauvages qui terrorisaient les populations. C 'est vrai, et nous ne
plaidons pas pour un retour au Moyen Âge. Mais le rapport de force
est si déséquilibré, si menacés les reliquats de nos massacres,
que l'on peut bien investir quelques milliers d'euros pour protéger
les troupeaux des dégâts des ours, commode boucs émissaire de la
crise qui touche la filière ovine. A transformer les bêtes en
chose, il se pourrait bien que l'homme perde sa propre humanité. »
p131-132.
La grande panne, Hadrien Klent, le tripode, 19€
"Normand pose son café, s'assied, allume son ordinateur. Sa Livebox, en bas est débranchée. Ne veut pas être tenté d'aller sur Internet, veut pouvoir écrire. Le temps que son ordinateur finisse de se mettre en marche, il regarde la mer sans chercher à isoler un endroit où poser son regard: ça bouge, c'est vivant. Si tout pouvait être comme ça" extrait page 47 L'aimant, Richard Gaitet, éditions intervalles, 19€
Gabriel est un jeune marin belge, facétieux, fort en
gueule mais maladroit. Il veut apprendre à naviguer mais aussi à boire, à
se battre et à aimer. Pour sa première traversée transatlantique, le
voilà radio sur un cargo, d’Anvers à Buenos Aires. Hélas ! Une escale
aux Açores lui révèle qu’une organisation secrète internationale vient
de s’accaparer les ressources inespérées d’un recoin du pôle Sud,
menaçant l’équilibre géomagnétique mondial…
Saura-t-il conjurer la catastrophe ?
Roman contemporain d’aventures maritimes, récit d’initiation tragi-comique aux accents surnaturels, L’Aimant poursuit l’histoire d’un titre méconnu de Jules Verne, Le Sphinx des glaces, qui reprenait déjà l’intrigue irrésolue de l’unique roman d’Edgar Allan Poe, Aventures d’Arthur Gordon Pym. La conclusion rocambolesque d’un mystère littéraire au long cours.
Cassandra, Todd Robinson, Gallmeister, 17€50 (traduit par Laurent Bury)
« Que vous soyez col blanc ou col
bleu, à Boston, vous habitez avec ceux qui s'habillent comme vous.
La limite séparant les classes sociales tranche dans le vif comme un
scalpel et creuse un fossé infranchissable. »
« Junior et moi, on assurait la
sécurité tout seuls : je gardais la porte pendant que Junior
surveillait les trois étages de la boîte. A nous deux, on pouvait
faire la police sans mal au milieu de quelques dizaines d'ados
squelettiques. On était moins des videurs que des baby-sitters, avec
notre poids combiné de deux cent quinze kilos (surtout les miens) et
nos dix mille dollars de tatouage (surtout ceux de Junior). »
« Parcouru d'un frisson
nabokovien, je redirigeai mon attention vers la foule. (Et oui,
putain je sais qui est nabokov. Je suis videur, pas attardé mental »
« On prévoyait de s'acheter un
ordinateur un jour. D'un autre côté, on prévoyait aussi de gagner
un million de dollars à la loterie et de partir vivre à Hawaï
fabriquer des strings sur mesure pour Nathalie Portman. Les deux
projets avaient autant de chances l'un que l'autre de se réaliser. »
Un jardin dans les Appalaches, Barbara Kingsolver, Rivages poche, 10€50 Embarqué, Christian Cailleaux, Futuropolis, 24€ Le pays qui vient de loin, André Bucher, Points, 5€70 Lettres pour le monde sauvage, Wallace Stegner, Gallmeister, 22€ traduit par Anatole Pons "Oubliez les développements métropolitains de Denver, Phoenix,Tucson, Albuquerque, Dallas-Fort Worth et Salt Lake City, qui poussent aux limites de leurs ressources en eau et au-delà, comme des cultures bactériennes débordant de leur gélose et commençant à se trouver écœurées par leurs propres déjections. Si nous voulons des villes caractéristiques de l'Ouest, nous devons les chercher, de manière paradoxale, en marge de l'urbanisme dominant de la région, en pleine cambrousse, là où les quatre-voies ne passent pas, ni les grandes lignes aériennes, et où les usines ne s'implantent pas." La montagne de la dernière chance, André Bucher, Le Mot et le Reste, 15€
L'automne à pas comptés lentement
s'éloigne, emportant avec lui en son rituel saisonnier, le
provisoire trépas des arbres sans feuilles. Le crépuscule se penche
sur le défilé. Dans les tréfonds on discerne encore quelque lueur,
ainsi une mince rivière, à peine un torrent, qui dans cet étroit
couleur se faufile, ignorant la durée du sursis et d'où l'on peut
surprendre, regarder s'ébattre les dernières truites puis admirer
la gerbe d'étoile qui glisse sur leur écailles dans un insouciant
abandon.
La grande confrérie de l'argent roi, les
bordées d'injures sur Facebook, le hourvari des portables, tout ce
cirque des codes, portiques de détection, la santé insolente de
l'industrie du luxe, la danse des sorciers du tweet, les cannibales
des hôtels aux noms d'oiseaux et les restaurants avec onomatopées
ou à tête de canard. Tous les bons petits soldats de la
mondialisation.
Muré dans cette aile, il ressemble à
un gardien de phare. Il est là, à l'approche des jours d'hiver,
vieil hibou fatigué, à épier l'improbable derrière les carreaux.
Des années, où qu'il soit, qu'il observe le paysage avec le
sentiment qu'au-delà des saisons, il pourrait exister un passage
temporel qu'il n'aurait point encore connu ou découvert.
Les ombres du canyon tels des phalènes
géomètres, dans l'obscurité se déplaçaient. Elles allongeaient
leurs membres dans la nuit et les montagnes, se dérobant au
spectacle, reculaient. Le froid s'était accru, il ralentirait
l'ouvrage. Ici, un homme parvenait à laisser son empreinte, se
forger un destin en testant sa volonté face au paysage tout entier.
Dans l'après-midi le vent du sud se
leva, souffla sans discontinuer jusqu'au lendemain. Puis il
s'assagit, cédant la place à une tourmente neigeuse. Des flocons
par centaines, des milliers d'abeilles blanches. Le ciel était en
lambeaux, son plafond trop bas, lacéré par les crêtes.
La vieille dame éternuait.
La montagne et le canyons se sont tus,
il n'y a pas si longtemps, alors qu'on dirait des siècles. Leur
silence s'est d'abord teinté de blanc. Pourtant, derrière cette
carapace immobile, son cœur de tortue respire en d'imprévisibles
mouvements. En surface, d'apparence, rien ne change. Le soleil
illumine, la lune asperge et bat son plein, sauf qu'issue d'entre ces
deux astres, la lumière n'est point la même. Face à ce paysage
neuf les lieux les plus familiers paraissent lointains. Les nuages
clignent des cils puis replient leurs paupières. L'obscurité peu à
peu ferme les cieux. La nuit vient. Les étoiles aussi se battent,
comme des cœurs.
Ah ! Le silence virtuel des rêves,
des sursauts, des présages. Dans la foulée, la pelote se dévide,
on tire avec, les souvenirs, les images, les sensations. Le réveil
sonne à point nommé, il soigne la légère entorse au réel.
Cry Father, Benjamin Whitmer, Gallmesiter (neonoir), 16€50
"Ce qui se passe, quand on
travaille dans des zones sinistrées, c'est qu'on s'attend à ce que
le reste du pays soit en meilleur état. Et peut-être bien que
certains endroits le sont. Certaines parties des côtes, peut-être,
là où vivent les gens importants. Mais l'intérieur est en naufrage
perpétuel et les ruines que laisse un ouragan ne sont pas
différentes en degré de celles que l'on trouve dans n'importe
quelle ville du Midwest.
Ça se voit aux bars plus qu'à
n'importe quoi d'autre. Les bars sont les mêmes. Ça vous étonnera
peut-être, mais quelle que soit l'ampleur des dégâts, il y a
toujours des bars. Quelqu'un servait des coups à la Nouvelle-Orléans
le lendemain du jour où les digues ont cédés, vous pouvez en être
sûr. Tous les hôpitaux étaient inondés, les églises fermées,
mais le lendemain il y avait un rade qui servait des bourbons bien
tassés à des ivrognes déboussolés par la catastrophe, même si
c'était juste un comptoir en contreplaqué posé sur deux tréteaux.
Et ces bars de fortune qu'on trouve dans les zones sinistrées ne
sont pas les plus déprimants que n'importe quel rade à bière de la
Rust Belt. »
« Les après-midi chaudes où le
rouleau de puanteur d'huile et de charogne vient submerger la zone,
vous avez l'impression que vous allez mourir étouffé dans une
conduite d'égout. On appelle ça la grande puanteur, et la rumeur
dit qu'on peut s'y faire avec le temps. La rumeur dit aussi que parmi
les résidents de troisième génération certains prétendraient ne
plus la remarquer du tout. Mais il y a très peu de résidents de
troisième génération.
Le quartier a cependant quelques
avantages par rapport au reste de Denver. L'un deux, qui ne cesse pas
de ravir Junior, étant une quasi-nullité de la présence policière.
Toutes les villes ont leurs quartiers abandonnés à l'industrie.
Toutes les villes ont leurs friches et leurs zones dévastées,
sacrifiées sur l'autel d'un bien supérieur. Tant que vous êtes
capables de supporter d'y habiter, ces lieux comptent parmi les rares
où vous pouvez presque être libre de vivre comme vous voulez. »
« C'est le genre de discours qui
l'envoie directement en sortie de route. Il n'a plus l'emprise qu'il
faut sur le volant pour assurer des devoirs, et l'idée de tourner la
page suffit à l'envoyer se fracasser contre un arbre. »
Je hais les dimanches, Hervé Bellec, éditions dialogues, 16€90
L'enfer de Church Street, Jake Hinkson, Gallmeister 15€ (nouvelle collection néonoir)
http://www.gallmeister.fr/la-maison/neonoir Les arpenteurs, Kim Zupan, Gallmeister, 23€90
Berezina, en side car avec Napoléon, Sylvain Tesson, édition Guérin, 19€50
Pouvions-nous vibrer des mêmes élans,
accepter les mêmes sacrifices ? Les comprendre seulement ?
Les Trentes Glorieuses avaient servi à cela : nous aménager
des paradis familiers, des bonheurs domestiques, des jouissances
privées. Nous permettre d'avoir beaucoup à perdre. Aurions-nous été
prêts à abandonner nos Capoue pour forcer le Moujik sous les bulbes
ou conquérir les pyramides ?
Et puis, nous étions devenus des
individus. Et, dans notre monde, l'individu n'acceptait le sacrifice
que pour d'autres individus de son choix : les siens, ses
proches – quelques amis peut être. Les seules guerres envisageable
consistaient à défendre nos biens. Nous voulions bien combattre,
mais pour le salut de nos paliers d'appartement. Nous n'aurions plus
surenchéri d'enthousiasme à l'idée de nous sacrifier pour une idée
abstraite, supérieure à nous même, pour un intérêt collectif et
– pire –pour l'amour d'un chef.
Et parmi tous ces chiens qui nous
mordaient aux basques, il y avait le pire de tous : le sommeil.
Je luttais à grands coups de poing dans le casque pour ne pas fermer
les yeux. Parlons-en de mes yeux ! Myope comme un statisticien,
je ne distinguais rien à travers la triple protection de mes
lunettes, de mon masque et de la visière de mon casque. Au début,
j'essayai de nettoyer la buée, mais mes gants pleins de boue
laissaient des traînées opaques sur le Plexiglas. Alors,
recroquevillé sur mon siège, interprétant du mieux que je pouvais
le peu que je distinguais, je me dis que Gras et Goisque étaient de
bien singuliers compagnons. Me confier leurs vies, à moi, incapable
de distinguer les feux arrières des camions serbes à moins de
trente mètres, manifestait une sacrée preuve d'amitié. P71
La France, petit paradis peuplé de
gens qui se pensent en enfer, administré par des pères-la-vertu
occupés à brider les habitants du parc humain[...].p25
« Nonobstant la pétarade, nous
nous serions crus en traîneau, traversant des forêts de contes.
J'avais mal calculé la réserve d'essence, nous tombâmes en panne à
huit kilomètres de la grand-route. Gras et moi partîmes avec un
bidon, vers un village, encalminé dans les congères, à deux
kilomètres de là, derrière un rideau de peupliers, laissant
Goisque au piquet, près de l'Oural. A peine avions-nous atteint les
isbas qu'une voiture de flic s'arrêtait près du side-car. Les
russes siphonnèrent leur réservoir, offrirent cinq litres et
repartirent en souhaitant à Goisque « de ne pas mourir ».
La vue du drapeau, du bicorne, de nos insignes impériales ravissait
les Russes. Le nom de Napoléon les mettait toujours en grand
frétillement. Evoquer à autrui ce dont il a triomphé est l'une des
petites joies dont on aurait tort de le priver. Ce jour-là, nous
dûmes nos cinq litres à l'aura de l'Empereur. »
p68
Extraits:
« Mais quand je me suis présenté
au guichet et que j'ai rendu mon fusil, ça m'a coupé dans mon élan.
C'était la première fois que je me séparais de mon arme depuis des
mois. Je ne savais plus où mettre les mains. D'abord, je les ai
mises dans mes poches, puis je les ai ressorties et j'ai croisé les
bras, et finalement, je les ai laissées retomber, inutiles, le long
du corps. » page 14
« Voilà, c'est comme ça que
s'est passé mon retour à la maison. C'était chouette, je dirais.
Rentrer c'est comme respirer pour la première fois après failli se
noyer. Même si ça fait mal, c'est bon. » page 18
« On a pris ma prime de combat et
on a acheté des tas de choses. C'est comme ça que l'Amérique
riposte aux terroristes. » page 20
« Il y a des types qui grimpent
directement au rouge. Ils y restent pendant un moment, et puis ils
s'écrasent, ils retombent en dessous du vert, plus bas que le niveau
« J'en ai rien à foutre de mourir. » La plupart des
autres restent à l'orange en permanence.
Vous voulez savoir ce qu'est l'orange ?
Vous ne voyez plus et vous n'entendez plus comme avant. La chimie de
votre cerveau change. Vous saisissez tous les détails de votre
environnement, absolument tous. Je pouvais repérer une pièce cents
à vingt mètres de distance dans la rue. » pages 21 - 22
« La porte de derrière mène à
la cuisine. A droite, OK. A gauche, OK. En haut, OK. A l'arrière,
OK. Cuisine, OK. On avance, on ne se regroupe pas, on continue à
avancer. Lentement, question de fluidité. La fluidité, c'est la
rapidité. Le groupe du caporal-chef Sweet vous nettoie une maison
comme l'eau qui coule dans un ruisseau. »
« Le 1er Bataillon du 9e marines.
The walking Dead.
Les devises des bataillons étant ce
qu'elles sont, ils ont probablement la meilleure. Grâce au Vietnam,
le 1/9 se targue de détenir le record du plus haut taux de morts au
combat dans toute l'histoire du corps des marines. Les marines, qui
aiment se voir comme des chiens enragés d'une agressivité
suicidaire, et qui parfois se comportent de manière à être à la
hauteur d'une telle image de soi, considèrent qu'un tel record,
c'est « super ».
« Vous courrez suffisamment vite
et au bout d'un moment, c'est bon, toutes les émotions contenues
s'expriment dans le mouvement de vos bras, la brûlure dans votre
poitrine, le poids lent et pesant de la fatigue dans vos jambes, et
vous pouvez vous laisser aller à penser tout simplement. Vous pouvez
penser en éprouvant de la rage, du chagrin, n'importe quoi, et cela
ne vous déchire pas, parce que vous êtes en train de faire quelque
chose, quelque chose qui est assez dure pour que vous le ressentiez
comme une réponse appropriée à l'agitation dans votre esprit. Les
émotions ont besoin d'un exutoire physique. Et si vous avez un peu
de chance, le physique prend le pas sur tout le reste. Cela
m'arrivait autrefois, quand je pratiquais le combat libre. Vous
vous épuisez jusqu'à ce qu'il n'y ait plus que la douleur et
l'euphorie. Quand vous atteignez cet état, le reste ne vous manque
plus, tous les petits sentiments que vous éprouvez. »
« Le bruit nous avait frappés de
plein fouet, se répercutant dans tout notre corps, à l'intérieur
de notre poitrine, dans nos entrailles et nos dents du fond. Je
sentais le goût de la poudre dans l'air. Quand les canons tiraient,
les tubes coulissaient en arrière comme des pistons, avant de
reprendre leur position, la force de chaque obus qui partait
soulevant un nuage de fumée et de poussière. Quand j'ai regardé la
rangée des pièces, je n'avais pas vu six canons. J'avais simplement
vu du feu à travers le brouillard, ou même pas du feu, mais de
simples éclairs rouges dans la poussière et la cordite. Je sentais
le rugissement de chacun des canons, pas seulement celui du nôtre, à
chaque tir. Et je me disais, Mon Dieu, voilà pourquoi je suis
content d'être artilleur. »
L'ile du point Nemo, Jean-Marie Blas de Roblès, Zulma, 22€50
Dernier jour sur Terre, David Vann, Gallmeister (collection totem) 10,50€
On ne voyait que le bonheur, Grégoire Delacourt, JC Latès, 19€
Un été dans la sierra, John Muir, Hoebecke, collection étonnant voyageur, 18€50
Le voyage de Robey childs, Robert Olmstead, Gallmeister, 23€10 extraits: page 32/33: Au-delà du Mississippi, le temps était gros et agité et durait des semaines. Le froid était trop froid, le chaud trop chaud, quant à l'eau, il y en avait trop ou pas du tout. La nature s'était mise à nu: sable brillant, pierres striés par le vents Page 63: Dans la chaleur et la sécheresse, les sauterelles sciaient l'air et les routes poudreuses lui faisaient respirer beaucoup de poussière. Il voyagea toute la journée, puis il dormit et se réveilla au lever du jour pour repartir à travers une campagne très peu peuplée. Il offrait un spectacle si misérable, la tête entouré d'un chiffon taché de sang séché, qu'il décida qu'il n'était pas nécessaire d'éviter les zones habitées.
Le Major leva les yeux de
sa montre et, trouvant, selon toute apparence, le visage de Robey
engageant, planta son regard dans celui du garçon en souriant. Le
major continua à l'observer, le fixant droit dans les yeux , et
Robey soutint son regard sans se laisser impressionner, et bien vite,
ce fut comme si ni l'un ni l'autre n'étaient dans cette pièce. Ce
n'était plus la nuit, ni le jour, et ils n'étaient plus ni l'un ni
l'autre dans l'univers de la guerre. Le major était ailleurs- dans
un autre endroit, dans une autre époque, et c'était là qu'il
voyait Robey.
Mémoire vagabonde, Laurent Kloetzer, Mnémos 20€
S'abandonner à vivre, Sylvain Tesson, Gallimard, 17€90
Extrait N°1: Le barrage
"Des baraquements en ciment avaient
poussé sur les versants de la jungle, des villages de toiles de
tente avaient recouvert les champs cultivés pour contenir les flots
de l'armée des terrassiers. Des enfants étaient nés et se voyaient
enrôlés aussitôt en âge de brouetter. Le chantier digérait les
hommes en Moloch insatiable. A la pelle, à la pioche, charriant la
terre dans les paniers d'osier, l'immense marée humaine, à peine
mieux équipée que les troupes des bâtisseurs de pyramides, à
petits gestes d'insectes, avait commencé l'entreprise titanesque. On
avait crevé la terre, arasé les reliefs, tranché le bois des
forêts, canalisé les cours d'eau et levé une muraille de retenue
de cent quarante mètres de haut à la force des muscles. Les maîtres
du grand œuvre savaient pouvoir compter sur l'inépuisable réservoir
humain pour suppléer le manque de machines. Sur le chantier, des
adolescents, des vieillards épuisés, des femmes enceintes
obéissaient aux hurlements des contremaîtres claquants comme des
ordres de matons. Les lignes de trains déversaient le ressac humain
au fur et à mesure que les besoins de bras s’accroissaient. Dans
l'effort collectif, on avait retrouvé l'enthousiasme des travaux de
l'époque de Mao, c'était du moins ce que les médias d’État
serinaient dans leurs bulletins. C'était
l'un de ses chantiers prométhéens tels que l'Europe de l'Ouest
anesthésiée par ses régulations, tétanisé par ses doutes,
intoxiquée de haine de soi aurait été incapable de mener."
Extraits N°2: La gouttière
"Je n'ai pas de téléphone
portable car je trouve d'une insondable goujaterie d'appeler
quelqu'un sans lui en demander au préalable l'autorisation par voie
de courrier. Je refuse de répondre au « drelin » du
premier venu. Les gens sont si empressés de briser nos
silences...J'aime Degas,lançant « c'est donc cela le
téléphone ? On vous sonne et vous accourez comme un
domestique. » Les sonneries sectionnent le flux du temps,
massacrent la pâte de la durée, hachent les journées, comme le
couteau du cuisinier japonais le concombre.
"L'escalade
est un sport de combat. Grimper les parois affûte le corps,
développe une musculature spécifique, accroît la capacité de
concentration, enseigne une gestuelle, dote d'un sens de l'équilibre
et d'une résistance physiologique qui appartiennent en propre à
cette discipline. Mais le plus important c'est l'instinct que
l'activité aiguise au suprême. Le grimpeur, mis de son plein chef
dans des situations impossibles, doit opposer au danger son
inspiration, son imagination, ses réflexes. Grimper c'est se
mouvoir « dignement dans l'incertain », comme
l'écrivait Chardonne, survivre sur des pentes qui s'éboulent,
guerroyer contre l'inconnu. Et opposer sans cesse des décisions
vitales au jaillissement d'embûches, avec, en cas de mauvais choix,
la mort."
Extrait n°3: l'exil
"Et
le camion charriant sa métastase, déroulant derrière lui une
spirale de fumée et de sable, continua sa route dans le feu
saharien. Les étoiles brillaient, se fichant pas mal de la peine des
hommes. Ils n'avaient qu'à mieux se débrouiller pour ne pas faire
de leur vie un enfer.
L'air avait changé. Une
odeur de pourpier écrasé, légèrement acide, l'imprégnait. Les
hommes des sables n'avaient jamais respiré l'iode. Ils peuplaient
des plages sans mer, des rivages arides qu'ils essayaient de fuir
depuis que la sécheresse s'y était abattue."
"Il se fit à cette vie de
vers de farine, enfoui dans le béton, la fumée, la foule. A ces
visages sans vie, ces corps blancs et mous. Il regardait glisser,
entre les tours de ciment, le soleil d'Occident qui ne diffusait
aucune énergie. Au désert le soleil brûlait."
Lettres de Gourgounel, Kenneth White, Grasset 7€20
Et soudain je fus de nouveau en vie. Etait-ce la fumée bleue? Je n'avais rien mangé, je le jure, et la bouteille de vin offerte par Habauzit, le philosophe, était restée dans un coin. Ce devait être la fumée qui montait du feu. Bois de châtaigner et de cerisier: je donne gracieusement cette recette à tous les futurs chercheurs d'inspiration Les évaporés, Thomas B. Reverdy, Flammarion, 19€
Les revenants, Olivier Morel, futuropolis, 19€
Les prédateurs du béton, enquête sur la multinationale Vinci, Nicolas de la Casinière, Libertalia, 8€
La confrérie des chasseurs de livres, Raphaël Jerusalmy, Actes Sud, 21€
Sur la route again, aux états unis avec Kerouac, Guillaume Cherel, Transboréal, 20€90
Pour les amoureux de Kerouac et de la Beat generation, ou tout simplement pour avoir une autre idée de l'amérique d'aujourd'hui et de ce qu'elle est devenue....Une vision brut de décoffrage sur la dérive du american way of life. Ici une description non édulcorée, franche et terrible.
Quelques extraits:
"La génération actuelle n'a plus envie
de grand-chose, même pas de voyager, ni d'espérer. Elle veut juste
planer, s'amuser, boire, manger, jouer aux jeux vidéo, consommer,
gagner vite de l'argent...pur bien s'habiller. Elle veut dormir
longtemps. Déjà fatiguée de vivre."
"Steve, lui, Afro-Américain de 40 ans,
raconte qu'il s'en sortait jusque-là en cultivant son potager, mais
que ça ne suffit plus : « j'ai été viré de Good
Years « Bonne année »... tu parles d'un nom ! Je
passais ma vie à travailler, à dormir, à voyager pour aller
travailler puis à dormir. Pas de petite amie, rien que la télé, le
base-ball et la bière ! » Ainsi va l'American Way of
(Fucking) life. On se plaint pas, on subit."
« Si t'es incapable de payer tes
factures ou de garder un boulot, c'est de ta faute. T'es un loser,
c'est tout. Pas celle du gouvernement ni du système, puisque c'est
le meilleur du monde ! D'ailleurs, on se contrefout de ce qu'on
peut bien penser de nous... C'est la pensée unique. Suffit de voir
le nombre de drapeaux américains partout : nous sommes
nationalistes, protectionnistes et merde au reste du monde. »
"La route, c'est une aube qui n'en finit
pas. Le bonheur de prendre la route, c'est de tout faire à nouveau
comme si c'était la première fois. On a coutume de dire que seul le
voyage compte. Que la destination importe peu... Ce n'est pas mon
avis. L'action de voyager en elle-même ne m'intéresse pas tant que
ça. C'est le vertige du dépaysement qui me vrille les neurones et
me donne l'impression de renaître à chaque fois. Tous les sens en
éveil, à chaque destination... A chaque arrêt sur image. De
nouvelles odeurs. Architectures, etc. A chaque fois que j'arrive
quelque part, je me dis : des gens que je connaissais pas vivent
ici. J'aimerai les connaître tous ! Partout."
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Elfes et assassins, Miller et Davoust, Mnémos, 16€
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Lecture de Tatiana |
Des phoques aux cocotiers et aux serpents à lunette. L'amérique en auto. Georges Simenon, le livre de poche, 5€60
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Lecture de Romain |
Le café du coin, Sait Faik Abasiyanik, bleu autour, 17€
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Lecture de Romain / coup de coeur |
Quatrième de couverture:
Rarement dans la littérature mondiale un écrivain a su croquer le
quotidien avec tant de finesse », écrit dans sa préface Enis Batur à
propos de Sait Faik, ce marginal « qui a révolutionné la prose turque ».
Dans ce recueil paru en 1950, l’un de ses plus aboutis, le nouvelliste
mêle ses rêveries aux mésaventures des oubliés de la vie qu’il côtoie
entre Istanbul et son île de pêcheurs. C’est drôle, mélancolique, d’une
totale liberté.
L’alcool, l’amour, la maison, la famille, l’amitié, l’amusement, les affaires de ce monde, et même une idée… Il est des jours où toutes ces choses ressemblent à des ballons rouges, verts, jaunes, orange percés par une aiguille ou une cigarette allumée. Tout perd instantanément sa couleur, sa légèreté, sa joie. Peut-on échapper à ces moments-là ? Existe-t-il des gens dont les ballons ne sont jamais percés ? Selon les jours, je les envie ou je les méprise.
Premier sang, David Morrell, Totem
(Gallmeister) 10€00
C'est mon droit de décider si
je veux rester ou pas. Personne ne peut décider de ça à ma place.
Mais ce flic est plus sympa que les
autres avant. Plus correct. Pourquoi aller l'emmerder ? Fais ce
qu'il te dit. C'est pas parce que quelqu'un me tend un sac de merde
avec le sourire que je vais l'accepter. J'en ai rien à foutre qu'il
soit sympa. C'est ce qu'il fait qui compte.
Mais, c'est vrai que t'as une sacrée
dégaine, comme si t'allais faire des histoires. Là-dessus, il a
raison. Mais moi aussi j'ai raison. C'est la quinzième putain de
ville où ça m'arrive. Cette fois, c'est la dernière. Pas question
que je me fasse éjecter encore une fois bordel. Pourquoi ne pas lui
raconter tout ça ? Te nettoyer un coup ? T'en aurais pas
un peu envie de tous ces ennuis qui vont te tomber dessus ? T'as
besoin d'action, c'est ça ? Comme ça tu pourrais lui montrer
que t'en as ?
Je n'ai pas à m'expliquer, non, pas
plus à lui qu'à quelqu'un d'autre. Quand on est passé par où je
suis passé, on n'a d'explications à donner à personne.
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Histoires d'ici et d'ailleurs, Luis
Sepulveda, Métailié, 17€ (lecture de Romain)
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disponible en poche |
Ils en parlent comme d'un jeu innocent.
Ils tapent sur l'épaule de Pablo et le déclarent meilleur
« renvoyeur » de grenades lacrymogènes.
_Tu n'avais pas peur, Pablo ?
_ je ne sais pas. Moins que les
Palestiniens de l'Intifada. Et puis ça sert à quoi d'avoir peur ?
Moi je ne veux pas vivre...
Garrido le Fou secoue la tête en
entendant ces paroles. Il a envie de dire quelque chose mais le
regard impérieux de Pablo qui a seize ans et qui ne veut pas vivre,
croise celui du champion prématurément vieilli et l'oblige à se
taire.
_Et toi, Cécilia, tu es d'accord avec
Pablo ?
Cécilia a dix-sept ans. C'est une
jolie fille. Elle balance son corps bien fait sur des chaussures aux
talons usés et cherche ses mots.
_Je ne sais pas, avant je rêvais de
vivre. Je rêvais de toutes les belles choses que je pourrais faire
quand je serais grande. Maintenant, je ne rêve plus. Maintenant,
j'ai peur de rêver et, quand ça m'arrive, ça me met en colère,
les rêves sont des mensonges.
J'ouvre la porte et je vois un jeune
homme auquel il ne manque plus que le chapeau de Baden Powell pour
ressembler à un scout. Il déclare aussitôt qu'il ne demande ni
argent ni nourriture, juste des livres, car dans son quartier, ils
sont en train de créer une bibliothèque. Après quoi il montre
divers documents prouvant sa qualité de biblio-volontaire dans une
commune pauvre de Santiago.
Il emporte avec lui Cavalerie rouge
d'Isaac Babel, un roman d'Andrea Mateo Sagasta, Voleurs d'encre
et deux de mes livres. Je le regarde s'éloigner, convaincu et
décidé. Cet agitateur de la lecture, ce dangereux combattant de la
culture n'a pas plus de quinze ans et me rappelle moi quand j'avais
son âge.
_Tu pleures ? Me demande ma
compagne.
_Oui, je pleure parce que tout n'est
pas perdu.
Comment tout a commencé, Pete
Fromm, Gallmeister, 23€70
Lecture de Romain
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« _ Et Alors ?
_ Alors ? Et alors ? Alors
qu'es-ce qu'il cloche, chez moi ?
J'y voyais clair maintenant,
suffisamment pour savoir que les yeux d'Abilene étaient encore
fermés face au ciel éblouissant.
_ Rien du tout.
Abilene inspira longuement.
_ Trouble bipolaire, dit-elle, comme si
elle n'était venue ici que pour prononcer ces deux mots nouveaux. (
J'observai ses yeux, toujours bien fermés.) Elle appelle ça comme
ça. Je suis un genre d'aimant, Austin. Avec moi, les boussoles
perdent le nord.
_ Bipolaire ?
_ Ca veux dire maniaco-depressif en
langage médecin. Ce qui est juste un joli mot pour fou à lier.
_ C'est eux les dingues, Ab'lene. Tu
n'as aucun problème. Ton seul problème c'est d'être coincé ici.
_Mais toi aussi, Austin, tu es coincé
ici, murmura-t-elle. Et tu ne t'es pas fait engrosser comme une
débile, comme une pute à deux balles. »
Les ELus du changelin, tome 1, les Enfants du fleuve
Greg Keyes, Fleuve noir, lecture de Tatiana
Greg Keyes, Fleuve noir, lecture de Tatiana
Sur la route, Jack kerouac le rouleau original, Gallimard, lecture de Romain
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Format poche 8€60 |
« Neal et moi, on s'est installés sur la banquette arrière pour les laisser faire ce qu'ils voulaient et on a parlé. « Dis donc, l'alto, hier soir, il avait le IT, la pulse, mec. Et une fois qu'il l'a tenue, il l'a plus lâchée. J'avais jamais entendu un gars tenir si longtemps. » J'ai voulu savoir ce qu'il appelait la pulse. « Alors là, mec, a dit Neal en riant, tu me parles d'im-pon-dé-ra-bles...hum ! Bon, t'as le gars, avec tout le monde autour, d'accord ? C'est à lui de déballer ce que tout le monde a en tête. Il démarre le premier chorus, il aligne ses idées, et là les gens,ouais-ouais, mais chope la pulse, alors lui, faut qu'il soit à la hauteur, faut qu'il souffle, quoi. Tout d'un coup, quelque part, au milieu du chorus, voilà qu'il CHOPE LA PULSE...Tout le monde lève le nez ; ils comprennent, ils écoutent ; il la chope, il la tient. Le temps s’arrête. Il remplit le vide avec la substance de notre vie. Il faut qu'il souffle pour passer tous les ponts et revenir ; et il faut qu'il le fasse avec un feeling infini pour la mélodie de l'instant, comme ça tout le monde comprend que ce qu'il compte , c'est pas la mélodie, c'est ça cette pulse... »
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le fameux manuscrit |
La Vie en cabane, Petit discours sur la frugalité et le retour à l’essentiel, David Lefèvre, transboréal 8€
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Dernières nouvelles du sud, Luis Sepulveda, Daniel Mordzinski, Points 6€30
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Sur chacune des histoires suivantes passe sans aucun doute le souffle des choses inexorablement perdues, et cet "inventaire des pertes" dont parlait Osvaldo Soriano et qui représente le coût impitoyable de notre époque.
"se hâter est le plus sûr moyen
de ne jamais arriver, seul les fuyards sont pressés" devise
Patagon
Les premiers habitants de Patagonie
utilisèrent la quila pour soutenir les peaux de guanaco de leurs
tentes, les rucas, mais aussi pour fabriquer les lances qui
freinèrent l'avance de nombreux régiments de cavalerie pendant la
Conquête. Plus tard, en 1880, quand on commença à coloniser le
grand territoire austral et que la presse britannique fit remarquer
non pas la fragile beauté de ce monde mais son potentiel économique
qui induisait "la triste nécessité d'anéantir les barbares",
les lances de quila ajoutées aux flèches et aux boleadoras
affrontèrent de nouveau les envahisseurs mais, cette fois, elles
furent vaincues par le plomb et les arguties juridiques des
usurpateurs avides de terre qu'ilsn'aimeraient jamais, de richesses
qui engraisseraient les banquiers d'Europe et d'un prestige que
l'histoire n'a pas encore commencé à juger.
Et l'odorat? le nez sens dessus-dessous, Catherine Bouvet, Elytis 6€10
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lecture de Romain |
L'expédition polaire à bicyclette, Robert Benchley, Points 4€70
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Lecture de Tatiana |
L'Expédition du Poisson Parlant, W.E. Bowman, Wombat, 16€
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Très librement inspiré de l'expédition du Kon-Tiki (disponible) |
"Là-bas, vers l'est, le dernier
promontoire s'efface derrière l'horizon et la terre ferme n'est
bientôt plus qu'un lointain souvenir. Le monde se contracte en un
vaste cercle d'eau au milieu duquel figurent le Poisson Parlant et
une population de cinq hommes à moitié nus, deux chats, une
grenouille, une huître et vingt-huit boîtes de sardines. Nous
sommes enfin seuls avec la mer, le ciel et notre grand ami le soleil
qui déverse à profusion ses bienfaits sur nous, brunissant nos
corps et adoucissants nos philosophies."
"Dans toute expédition, il y a – ou
devrait y avoir- un moment où les membres cessent de se comporter en
individus pour former un tout. C'est alors que l'aventure expérimenté
se détend pour la première fois, sachant qu'en dépit des
difficultés et des dangers qui les attendent, chacun de ses
compagnons fera son maximum pour la cause commune. Il les découvre
alors sous un nouveau jour et soupire d'aise en atteignant ce subtil
havre de paix psychologique."
"Aujourd'hui, un fait plutôt curieux
s'est produit. Hugo était monté dans la mâture et il prenait un
ris dans la drisse du hunier d'avant lorsqu'il s'emmêla la barbe
dans l'habitacle. Sans réfléchir, il poussa un cri de douleur, et
C.J., qui était occupé à pousser des « oh !hisse ! »,
attrapa une paire de ciseaux et courut libérer son ami. Il s'était
hissé jusqu'à la moitié du grand mât lorsque Hugo aperçut les
ciseaux et s'avisa du danger. Il hurla sauvagement et, d'un violent
coup de pied , envoya C.J. par dessus bord. Ce dernier ne sachant pas
nager, il appela à l'aide. Willy lança : « Un homme à
la mer ! » et plongea à son secours. Nos deux compagnons
dérivèrent rapidement vers l'arrière et je compris qu'ils
risquaient de ne plus pouvoir nous rejoindre. Je leur jetai une bouée
de sauvetage, qui tomba sur la tête de C.J. Et l'assomma. Willy
saisit la bouée de sauvetage d'une main et C.J. de l'autre et me
demanda de les haler sur le radeau. A l'instant où je me penchai
pour ramasser le cordage de la bouée, j'eus le temps de le voir
glisser dans l'eau. Moi même je basculai par dessus bord en tentant
de le rattraper."
Voyage aux îles de la Désolation, Emmanuel Lepage, Futuropolis 24€40
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Le plus petit baiser jamais recensé, Mathias malzieu, Flammarion 17€50
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lecture en cours de Romain (disponible) |
Plogoff, Delphine Le Lay / Alexis Horellou, Delcourt, 14€95
Plogoff la bande dessinée …
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disponible |
A l'heure de Notre Dame des Landes et
de son inutile projet d'aéroport, il est bon de se rappeler au
souvenir le scandaleux projet de la centrale nucléaire de Plogoff.
En 1975 le site de Plogoff est retenu pour la construction d'une
centrale nucléaire sur une faille ! S'en suivra une résistance
et une contestation de la part des habitants de la commune ainsi que
de toute la Bretagne.
Beaucoup d'encre à couler depuis, des
documentaires ont été tournés, mais jusqu'ici aucune bande
dessinée, c'est désormais chose faite !
Dans un registre très différent :
Arawn, Le Breton, Grenier, Soleil Celtic
1. Bran le Maudit, 13.95 €
2. Les liens du sang, 13.95 €
3. La Bataille de Cad Goddun, 13.95 €
4. Le Chaudron de sang, 13.95 €
"Monstre, Démon, Abomination.
Les Hommes imaginent que je suis le diable.$
Mais, que savent-ils du roi des Enfers ? Que savent-ils du Bien et du Mal ?
Les Hommes... Des petites créatures fragiles qui vivent dans la crainte. Des êtres stupides, aveugles et bornées.
Les Hommes sont des ignorants...
Je me nomme Arawn. Je suis le seigneur de la Terre Brûlée. Le roi des enfers. Le souverain des morts.
Les humains me redoutent. Ils ont raison. J'ignore la pitié. Je méprise la faiblesse.
Je suis le Dieu de la colère. Le Dieu Vengeur...
Pourtant, il n'en a pas toujours été ainsi. Jadis, j'étais un homme, sorti du ventre d'une mère..."
Le Chemin de l'espérance, Stéphane Hessel, Edgar Morin (Fayard) 5€
Petite poucette, Michel Serres (manifeste le pommier) 9€50
Temps des crises, Michel Serres (poche le pommier) 7€50
Pour compléter la découverte d'André Bucher et de son territoire :
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